La tonnelle
C’était l’été ; j’allais rêvant, le cœur bohème
En un endroit propice à écrire un poème
Quand soudain me parvint, brisant mon insouciance
Un bruit sourd, un tempo, l’écho d’une romance
Les notes me venaient, légères et joyeuses
De voler librement, je les sentais heureuses
Et ce ravissement à les savoir en fête
S’offrait comme un bonheur à mon cœur de poète
Mon pas qui se pressait et mon cœur qui chantait
M’amenèrent en ce lieu où la note naissait
Et là ils se tenaient, sous la tonnelle en fleur
Jouant d’un même accord, ils offraient du bonheur
Ce n’était point Mozart, solennel, élitaire
Mais dame chansonnette, légère et populaire
Qu’honoraient fièrement sous un bel odéon
Quelques êtres vieillis jouant l’accordéon
Et je me suis assis, m’accordant à mon être
Qui tremblait l’émotion que la note fait naître
Quelle authentique joie que de vivre l’instant
Qui transporte le corps et l’âme tout autant
J’étais comme un enfant; j’étais seul; j’étais moi
J’en oubliais le temps; je n’étais plus qu’émoi
L’instrument m’habitait; j’étais leurs doigts nerveux
C’était moi qui jouais; mon cœur était heureux.
Des couples enlacés faisaient tourner leurs corps
Et leur ronde légère égayait le décor
La tonnelle vibrait et les roses tremblaient
À l’unisson du cœur quelques lèvres chantaient
Et même le pinson qui allait voir sa belle
Se posa et charmé, siffla la ritournelle
Mais allez-vous me croire si je dis que mes yeux
Ont même vu au ciel danser anges et dieux
Il est des émotions qui transportent le cœur
Ineffables moments, on les nomme bonheur
Elles sont éternelles, créant le souvenir
Où mon être en secret se plaît à revenir
Mais vous, roses mortelles, qui avez dans la joie
Fait chanter et danser vos pétales de soie
Hélas, vous n’êtes plus, emportant avec vous
Le charme désuet de ce beau rendez-vous
L’accordéon s’est tu ; l’endroit s’est fait silence
Mais il existe un lieu où il n’est point absence
Non, ne le cherchez pas, car pour l’apercevoir
Sur le bord de mon cœur il faudra vous asseoir
Il joue la nostalgie d’un moment merveilleux
Que vous m’avez offert comme un cadeau précieux
Amis, je vous le dis, votre noble instrument
Toujours sera présence en mon cœur pleinement
Quelques mots encore…
La musique est ce lien qui unit tous les êtres
Au-delà de leur ciel, au-delà des paraîtres
Elle est depuis toujours ce céleste langage
Que l’humaine épopée nous laisse en héritage
Bienheureux est celui qui en fait sa maîtresse
Qui la vit en son cœur, jouit de sa caresse
Alors amis jouez, jouez, jouez encore
Ne laissez pas vos doigts oublier les accords
Qu’importe si le ton ou la note chancelle
Pourvu que la passion vous anime et appelle
En vos cœurs ce plaisir qui vous pousse à jouer
En nos cœurs ce bonheur qui nous pousse à chanter